Aucune explication rationnelle ne vient pour le moment éclaircir ce mystère qui vient s'ajouter aux nombreux cas de mortalité de cette population d'insectes ces derniers mois dans le Sud-Ouest.
"J'habite le petit bourg de Rions (Gironde) depuis plus de trente ans et je n'ai jamais vu une chose pareille. Mon garage, qui donne sur le village, est chaque soir depuis le 9 août envahi d'abeilles qui mettent des heures à mourir. A ce jour je les estime à 9.000. Au petit matin, elles sont toutes recroquevillées au sol, certaines agonisant encore après une nuit entière", raconte cette habitante qui souhaite garder l'anonymat.
"Ma première réaction a été d'appeler les pompiers. En général, elles meurent en l'espace de deux heures. Elles ne sont pas agressives mais plutôt fatiguées. En général, le gros des groupes meurt en l'espace de deux heures. Avec des amis, on a même essayé de les lancer en l'air pour qu'elles s'envolent, sans résultat. Elles s'écroulaient sur le sol en recrachant une sorte de pollen. Les arrivées sont sans interruption, sauf deux nuits depuis le début du mois", poursuit la propriétaire des lieux, qui insiste sur le fait que le phénomène s'est ralenti ces derniers jours sans cesser.
"J'en ai eu encore hier. J'ai mis quelques abeilles dans un sac et les ai rangées au congélateur dans l'espoir que des analyses soient faites. Les apiculteurs que j'ai contactés m'ont expliqué que si elles étaient empoisonnées, cela durerait jusqu'à la fin de la miellée."
Contacté lundi par l'Associated Press, les services vétérinaires faisaient savoir via la préfecture de la Gironde que des prélèvements seraient effectués en soirée et analysés dans les jours à venir.
De son côté, la municipalité a saisi les organismes officiels: "J'ai immédiatement prévenu les services vétérinaires et la direction départementale de l'agriculture", tenait à préciser Jean Despujols, le maire de Rions, commune de 1.500 âmes. "J'ai pris contact avec des apiculteurs de Rions qui n'ont pas constaté de mortalité anormale dans leurs ruches."
La maison où ces événements se sont produits se situe dans un périmètre protégé qui abrite des forages alimentant en eau potable plusieurs communes du canton, précise le maire, qui s'interroge sur la proximité "d'une culture récente de deux ou trois hectares de tournesol".
A quelques kilomètres de là, dans le secteur d'un village voisin, plusieurs hectares de maïs transgénique sont également cultivés. le maire, qui fait cette découverte récemment, déclare "n'être pas tenu au courant comme ses confrères de la localisation de telles cultures".
Joint lundi par l'AP, Me Philip Gaffé, avocat du Syndicat national de l'apiculture et apiculteur lui-même déclarait que cette situation "pourrait être le résultat d'une pratique agricole visant à produire soi-même ses propres insecticides à base de défoliants ou d'herbicide". "Cela ressemble également aux conséquence de l'utilisation de l'imidaclopride", contenu dans le fameux insecticide "gaucho", a-t-il relevé.Ces chercheurs ont recouru à des techniques de séquençage génétique des micro-organismes peuplant les intestins d'abeilles qui vivent dans des ruches saines et de celles frappées de ce fléau. Les échantillons ont été prélevés dans l'ensemble des Etats-Unis au cours d'une période de trois ans.
Ils ont pu établir qu'une variante du virus baptisé IAPV (Israeli Acute Paralysis Virus) qui paralyse les abeilles "pourrait être la cause potentielle" de cette hécatombe, a expliqué, lors d'une conférence de presse, Ian Lipkin, directeur du centre pour l'infection et l'immunologie de l'Université Columbia (New York, est).
L'IAPV était le seul micro-organisme présent dans quasiment tous les échantillons provenant des ruches affectées, soulignent les auteurs de cette étude publiée par la revue Science du 7 septembre.
"Notre prochaine étape est de déterminer si ce virus est la seule cause de ce phénomène de dépopulation massive des ruches, appelée en anglais CCD (Colony Collapse Disorder)" ou s'il agit parmi d'autres facteurs tels des microbes, des toxines, des insecticides ou une nutrition appauvrie par la sécheresse, a-t-il poursuivi.
Selon Jeffery Pettis, entomologiste du ministère américain de l'Agriculture et co-auteur de l'étude, "cette recherche ouvre une très bonne piste mais il est peu probable que l'IAPV soit l'unique cause du CCD".
Les analyses génomiques d'abeilles d'élevage importées d'Australie depuis 2004 ont en effet montré qu'elles étaient infectées par ce virus mais que leurs ruches ne développaient pas le CCD.
Cette différence semble s'expliquer par le fait que les abeilles en Australie ne sont pas infectées par la mite varroa, un parasite commun dans les ruches américaines qui affaiblit leur système immunitaire.
Ces scientifiques ont aussi écarté comme étant "très peu probables" plusieurs hypothèses avancées ces derniers mois pour tenter d'expliquer cette mystérieuse disparition de milliards d'abeilles.
Parmi ces théories figurent les radiations émises par les téléphones cellulaires qui désorienteraient les abeilles et les cultures génétiquement modifiées (OGM).
En revanche, a souligné Diana Cox-Foster, entomologiste à l'Université de Pennsylvanie (est) et principale auteur de l'étude, "certains insecticides chimiques paraissent affaiblir les abeilles, les rendant plus vulnérables à des virus".
Le CCD est un phénomène surtout observé aux Etats-Unis avec une telle ampleur: les abeilles adultes disparaissent de la ruche, laissant le miel et le pollen récolté ainsi que les jeunes et la reine. Le plus souvent, aucun corps d'abeille n'est retrouvé.
On estime que de 50% à 90% des ruches commerciales ont été affectées par le CCD depuis trois ans aux Etats-Unis. Depuis, des cas ont été signalés notamment en Allemagne, en Espagne et en Grèce.
Cette situation sans précédent inquiète les apiculteurs, les producteurs de fruits et légumes ainsi que les pouvoirs publics américains.
Les abeilles domestiques assurent la pollinisation de plus de 90 variétés de fruits et légumes dont les récoltes représentent 15 milliards de dollars par an aux Etats-Unis.
par Alain Genestine
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